jeudi 20 décembre 2018

12. Les systèmes continentaux de protection des droits de l'homme



Les Etats de 3 continents ont accepté la mise en place de systèmes de protection des droits de l'homme, en conformité avec les droits universels et les conventions continentales qui leur sont propres. Ces continents : sont l'Europe, l'Amérique et l'Afrique. La carence asiatique en la matière, si elle est notable, n'est pas étonnante. Il n'existe pas d'organisation pan-asiatique de solidarité.


Le 18 juillet 2018, les 3 cours continentales, dédiées à la protection des droits de l'Homme, ont adopté la Déclaration de San José en vue de renforcer leur coopération.


1. LES SYSTEMES EUROPEENS


Il ne s'agit pas d'un système mais des systèmes européens. En effet, outre l'OSCE (voir notamment son BIDDH), le Conseil de l'Europe et, dans une moindre mesure, l'Union européenne (UE) consacrent des droits et libertés qu'ils entendent garantir de manière effective, ainsi que la démocratie, dans le but d'assoir définitivement la paix et la sécurité sur le continent. 

Nota. Ces systèmes sont abordés de manière rapide dans la mesure où ils seront étudiés de manière plus approfondie en L2.
  • Le Conseil de l'Europe

L'UE et le Conseil de l'Europe ont en partage ce drapeau
Le Conseil de l'Europe (à ne pas confondre avec le Conseil européen, organe de l'Union européenne), est l'organisation continentale de référence en matière de protection des droits de l'homme. Son siège est à Strasbourg (à l'instar du Parlement européen qui, elle, est une  émanation de l'UE).

Gare aux confusions !

Le Conseil de l'Europe, en bref

Promouvoir les droits, la Commissaire aux droits de l'homme

Les observations de la Commissaire au sujet de la crise des "Gilets jaunes"

Le suivi par pays
  • Les droits garantis
Les droits garantis sont principalement les droits civils et politiques (droits de 1e génération) ainsi que les droits économiques & sociaux (droits de 2e génération).

A retenir. Les droits consacrés dans le cadre européen sont invocables devant les juridictions nationales. Ils priment sur les dispositions des lois et règlements nationaux. Selon les cas d'espèce, il appartient au juge national de les interpréter et de les appliquer.

telle qu'amendée par les Protocoles n° 11 et n° 14 (Rome, 1950)


A noter. le Conseil européen s'attache particulièrement à la protection des droits sociaux.


  • Le mécanisme de contrôle


La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) (site)


Faits & Chiffres (2018)

A retenir. Mise en place depuis 1959, la CEDH est une juridiction auprès du Conseil de l’Europe chargée de veiller au respect de la Convention européenne de 1950 et des protocoles additionnels dûment ratifiés et entrés en vigueur. Siégeant à Strasbourg, ces 47 juges (1 par Etat), élus pour 9 ans (non renouvelables), sont indépendants de leur pays d'origine. La Cour est dotée d'une compétence obligatoire ; en d'autres termes, les Etats parties doivent se soumettre à sa juridiction. Les Etats signataires de la Convention de 1950 ainsi que toute personne résidente (ressortissante ou non, personne physique, association, entreprise), s'estimant victime d'une violation de la Convention - dès lors qu'elles ont épuisé les voies de recours devant les juridictions nationales - peuvent saisir la Cour. La procédure est contradictoire et publique. Une solution à l'amiable est privilégiée, mais à défaut la CEDH aura à prendre un arrêt que l'autorité nationale sera tenue d'appliquer.
 


LA CEDH est de plus en plus critiquée par les gouvernements aux tendances autoritaires. Quelle autorité pour les juges des droits de l'homme en Europe ? 

  • L'Union européenne (UE)

La protection des droits de l'homme n'est pas la vocation première de l'UE. Pour preuve, il aura fallu attendre le XXIe siècle pour qu'un texte formalise son implication en la matière ! Soulignons par ailleurs que tous les Etats membres de l'UE sont individuellement parties prenantes à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La Charte des droits fondamentaux de l'UE, adoptée en 2001, est entrée en vigueur en 2009 (Traité de Lisbonne). Depuis, elle a valeur conventionnelle (elle prime donc sur les lois et règlements nationaux). Sa portée est cependant limitée dans la mesure où elle ne s'adresse qu'aux institutions de l'UE ainsi qu'aux Etats membres lorsqu'ils exécutent le droit de l'Union (à l'exception notable du Royaume-Uni, de la Pologne et de la République Tchèque). Selon les cas d'espèce, ses dispositions sont invocables devant les juridictions nationales.

 En bref


2. LE SYSTEME INTERAMERICAIN (OEA)


Les Etats américains sont les premiers, après le second conflit mondial, à réagir en faveur des droits de l'homme, par le biais d'une déclaration des droits et devoirs de l'homme, en 1948, et ce quelques mois avant les NU. 

Afin de protéger au mieux les droits et devoirs préalablement proclamés, les Etats américains ont par la suite adopté, en 1969. Cependant tous les Etats membres de l'OEA n'ont pas ratifié ce texte, en particulier les Etats-Unis et le Canada.


  • Les instruments juridiques
La Déclaration interaméricaine des droits et devoirs de l'homme (Bogota, 1948)

La Convention interaméricaine relative aux droits de l'homme (San José, 1969)
Une vingtaine d'Etats membres de l'OEA sont parties à la Convention (principalement sud-américains).

L'ensemble des instruments juridiques 


  • Le mécanisme interaméricain 
Qu'est-ce que la Commission IDH ?
La Commission IDH siège à Washington et traite des plaintes individuelles ou étatiques. Elle surveille, analyse la situation des droits de l'homme en Amérique, produit des rapports et présente des recommandations aux Etats de l'OEA ; enfin elle expose des cas de violation des droits garantis par la Convention auprès de la CIDH.

Le statut de la Commission américaine des droits de l'homme (La Paz, 1979)

Certains Etats américains se montrent particulièrement récalcitrants envers la Commission IDH, au point de menacer de ne plus la financer.
Le Nicaragua expulse des personnes mandatées par la Commission IDH (2018)


Les 7 membres de la Commission IDH, élus par l'AG de l'OEA pour 4 ans


Le statut de la Cour interaméricaine des droits de l'homme (Cour IDH) (La Paz, 1979) 
La Cour IDH a son siège à San José, au Costa Rica. Elle est en charge d’interpréter et de faire appliquer la Convention interaméricaine. La Cour est l'un des organes de l’OEA et assure des fonctions consultatives et contentieuses.

LA COUR INTERAMERICAINE DES DROITS DE L'HOMME

A noter que, contrairement au système européen, les requêtes individuelles directes sont impossibles devant la Cour et que ses décisions (une centaine par an) ne sont pas contraignantes. Néanmoins son action est primordiale pour faire émerger une véritable culture des droits de l'homme durable, tant ce continent est marqué par les dérives autoritaires (coups d'Etat, disparitions forcées, remise en cause de la liberté de la presse...), les régimes politiques particulièrement clivants (Guatemala, Honduras, Argentine, Brésil, Venezuela, Nicaragua, Pérou, Bolivie, Colombie...) et une forte discrimination politique, économique, sociale et culturelle à l'égard des minorités et des peuples autochtones (peuples vulnérables). La jurisprudence et les avis de la Cour sont originaux et audacieux (par exemple, elle conçoit des réparations non pécuniaires). Souvent contestée par des gouvernements récalcitrants, elle souffrait encore récemment d'un manque cruel de moyens financiers. 

Avis consultatif 23 portant sur l'environnement et les droits humains (2017)


Vue d'ensemble sur le dispositif américain


La Cour épingle le Pérou (2018)


3. LE SYSTEME AFRICAIN


Cette charte ratifiée par les Etats membres de l'OUA, aujourd'hui Union Africaine (UA), comprend des droits civils, politiques, sociaux, économiques et culturels assez complets auxquels s’ajoutent les droits des peuples (parmi lesquels : l’égalité des peuples, le droit à l’existence, à l’autodétermination, au développement). Autre spécificité africaine, la Charte met également l’accent sur les devoirs de l’individu envers la famille, l’Etat, la collectivité...


  • Le mécanisme africain  

Instruments juridiques

La Commission africaine des droits de l'homme et des peuples
La Commission ADHP siège à Banjul (Gambie) ; elle est composée de 11 membres, élus pour 6 ans, par la Conférence des chefs d'Etat et de gouvernement de l'UA.

La Commission ADHP promeut les droits de l'homme et des peuples (campagnes de sensibilisation, séminaires, conférences et missions), protège les droits de l'homme et des peuples par le biais de communications, de résolutions de conflits à l'amiable, de rapports envoyés aux Etats... et interprète la Charte sur demande (notamment des ONG)

La Commission ADHP déplore l'expulsion de migrants par l'Algérie



Pour approfondir sur la Commission

La Cour africaine des droits de l'homme et des peuples (Cour ADHP)
Cette Cour est appelée à fusionner avec la Cour de Justice de l'UA

Les 11 juges de la Cour africaine siège à Arusha (Tanzanie)
Le protocole portant statut de la Cour - entré en vigueur en 2004

30 Etats membres de l'Union UA ont ratifié ce Protocole et seulement 9 d'entre eux ont déposé une déclaration reconnaissant la compétence de la Cour en cas de saisine individuelle. Il s'agit du Bénin, du Burkina Faso, de la Côte d'Ivoire, du Ghana, du Malawi, du Mali, de la Tanzanie, de la Tunisie et depuis novembre 2018 la Gambie.

La Cour a rendu son premier arrêt en 2009. Elle est compétente en matière contentieuse et consultative.  

Le Mali, 1er Etat condamné au regard du Protocole de Maputo par la Cour ADHP (2018)

Vers une compétence pénale ? (le Protocole de Mabolo de l'UA)

La Cour ADH, une coquille vide ?

Liste des conférences

1. Conférence introductive LES ACTEURS DE LA SOCIETE INTERNATIONALE & LEURS RELATIONS 2. L'Etat 3. Les relations diplomatiques ...